Les données sont multiples, évolutives et d’origines diverses. Elles constituent un vivier d’informations significatives à qui sait en tirer partie. Analysées, elles permettent d’organiser des plans de maintenance préventive et prédictive. Détaillées et croisées avec les remontées du terrain, elles jouent un rôle prépondérant dans l’amélioration continue de la qualité. Notamment au travers de l’application des principes du lean management pour questionner et adapter les procédures de préparation et d’intervention. Sur ce chemin de l’amélioration, une chose devient essentielle, obtenir des mesures qualitatives suffisantes à traiter. Comment y parvenir? Florian Gayraud, Projects Director et spécialiste de la Supply Chain chez ITD, identifie les leviers pour mieux prévenir les pannes et anticiper la logistique.

Les sources de données

Les sources de données sont nombreuses et elles évoluent dans le temps.
Les informations du fournisseur (fabricant) constituent vraisemblablement les premières qu’il est possible d’obtenir. Avec un regard critique et technique, elles peuvent permettre d’identifier les points de faiblesse des équipements. La garantie, les données de durée de vie ou encore les préconisations en termes de maintenance et entretien facilitent la mise en œuvre de plans de maintenance et de swap. Attention toutefois à ces données nominales et parfois un peu marketées.

Les informations issues des observations sur le terrain peuvent être récoltées dès que les équipements sont installés. Rassemblées au cours d’une visite d’audit ou de maintenance préventive par exemple. Elles apportent une information d’utilisation réelle, à comparer aux données nominales du fabricant ou bien complémentaires à celles-ci sur d’autres paramètres. Les incidents engendrant des interventions correctives sont aussi à répertorier et participent à faire remonter des informations déterminantes. De manière générale, en lien avec les objectifs fixés, un écosystème de mesures et d’évaluation doit être défini, multi-sources et multi-indicateurs.

 

Maintenance préventive, un temps d’avance

Principe et objectif

La maintenance préventive vise à agir en amont d’un problème et non pas en réaction à l’occurrence de celui-ci qui impacte le service. L’objectif est ainsi d’identifier les pannes avant qu’elles ne surviennent en répétant des gammes de vérifications (mesure, évaluation). Il s’agit aussi de réaliser des changements d’équipements de manière préventive et systématique, selon une échelle temporelle prédéfinie.

Déterminer un plan de maintenance préventive

Pour être efficace, la maintenance préventive doit respecter des plans de contrôle et mesure répétés à fréquence définie. Ceux-ci sont constitués en considérant les données rassemblées et ci-nommées en début d’article. Il s’agit de déterminer précisément quoi et quand; que vérifier et quand le vérifier. L’utilisation du diagramme 5M (aussi appelé Fishbone ou Ishikawa diagram) peut faciliter l’identification des risques et causes racines potentielles d’un événement.

Solution d’évaluation

Il existe diverses solutions d’évaluation adaptées au type d’équipement, type de matériaux et à la capacité de prise de mesure. De la simple lecture d’un compteur horaire, ou de capteurs IoT (ou autre technologie) à la réalisation de tests non destructifs (de préférence), il est aussi possible d’utiliser des pièces (témoins) d’usure. Ces dernières, permettent d’identifier l’état d’usage d’un équipement souvent onéreux et/ou majeur. In fine, l’objectif est de changer les équipements au bon moment, ni trop tôt – diminuant le ROI – ni trop tard – engendrant des pannes et impactant le service.

Baisse des coûts, augmentation des revenues

Le fait de prévoir les interventions et de les planifier en amont donne l’avantage opérationnel aux gestionnaires de maintenance. Ils sont en mesure de lisser et coordonner les activités de leurs techniciens et sous-traitants. Les interventions peuvent être organisées en période creuse, limitant l’impact en cas de détérioration de la qualité de service en cours.
Il est ainsi possible de planifier des campagnes de maintenance par secteur, ou domaine fonctionnel. Cela améliore directement la qualité des contrôles de vérification du fait de deux facteurs :

  • par la répétitivité des points à contrôler,
  • par un temps d’intervention plus important grâce à la concentration géographique des sites à vérifier réduisant les temps de trajets.

La concentration géographique permet aussi d’augmenter le ratio temps productif/temps de trajet. Aussi, les interventions étant planifiées en période creuse, la perte de revenu est faible. Elle est même très faible en comparaison à une intervention non anticipée, qui interviendrait en réaction à une problématique identifiée.
La conséquence financière est immédiate à la fois par la réduction des coûts opérationnels, et par le maintien des revenus usuels lorsque le service est accessible.

Maintenance planifiée, prédictive

Les données collectées et associées aux données nominales des fabricants, permettent de prévoir l’occurrence de les prochaines pannes. Il est ainsi possible d’adapter des changements ou des entretiens prédictifs, planifiées en amont des pannes. Chaque nouvelle donnée obtenue complète la base d’informations et donne l’opportunité de préciser et d’adapter plus encore l’exécution des plans de maintenance.
C’est ainsi qu’en fonction de l’atteinte d’indicateurs prédéterminées :

  • un niveau horaire,
  • un niveau de température,
  • ou encore un nombre de cycles par exemple,

une action de maintenance spécifique peut être déclenchée et exécutée. Cela, alors même qu’aucune panne n’est pour l’heure à déplorer.

Adopter une démarche Lean

La prise de conscience de la nécessité du traitement des données peut s’opérer par le biais d’une démarche de lean management. Celle-ci vise à déterminer les données clés après avoir clairement défini les objectifs, à organiser leur collecte selon les solutions à disposition et à assurer l’analyse des écarts avec la situation visée. A partir des mesures constatées et par phases itératives, il est possible de mener des plans d’améliorations sur :

  • la précision des données récoltées,
  • les processus d’intervention en impliquant les utilisateurs,
  • l’expression et la mise en œuvre de standards fonctionnels.

Cette liste n’est pas exhaustive et d’autres démarches complémentaires peuvent faciliter l’atteinte des objectifs attendus.

Adapter les stocks selon l’état réel du matériel

La planification des interventions ayant chacune un modus operandi défini et un listing de matériel pré-déterminé (BOQ), cela apporte une visibilité dans le temps des équipements nécessaires. Les niveaux de stock cibles peuvent être déterminés pour l’ensemble des équipements et adaptés au regard des informations réelles du terrain. La casse matérielle n’est plus la norme mais devient l’exception. Le matériel potentiellement défectueux ou la cause des pannes ayant été remplacé avant l’occurrence du problème. Le taux de sur-pannes (victime collatérale) correspondant aux équipements détériorés suite au défaut d’un autre équipement amont est fortement réduit. La diversité des pièces détachées à tenir en stock est alors diminuée.

Organiser un schéma d’approvisionnement cohérent, efficace et rentable

L’urgence n’est plus de mise, aussi de nombreuses pistes d’améliorations de la performance supply chain dans sa globalité sont actionnables. La prévisibilité de la demande permet l’organisation d’une chaîne logistique structurée et consolidée à chacune des étapes.

Trouver l’équilibre

L’optimisation logistique visée suite à la mise en œuvre de maintenance préventive, prédictive ou planifiée doit se justifier. La tentation d’un système surperformant est grande lorsque de telles démarches globales sont initiées. Théoriquement, c’est attrayant. La réalité peut être bien plus complexe et coûteuse, aussi les quelques pourcentages de gains de performance espérés justifient-ils les conséquences induites par une sur-processualisation des opérations ? L’identification de la valeur ajoutée, basique du Lean management est primordiale afin de trouver la balance entre le coût (financier, humain, organisationnel), les risques inhérents et les performances visées. Il faut parfois accepter que le “mieux” peut être l’ennemi du “bien”.