Le déploiement de nouveaux sites ou l’upgrade des équipements pour ajouter la 5G et plus largement de nouvelles technologies relève d’un challenge de supply chain et de planification. De la définition des besoins radio à l’installation, en passant par la mise en service des équipements, nombreux sont les processus à mettre en place. Il faut trouver un emplacement (pour les nouveaux sites), négocier, définir un programme de travaux ou d’upgrade, piloter la construction puis finalement réaliser une batterie de tests. La multitude de projets et la volumétrie des sites à gérer simultanément s’ajoutent à la complexité de certains processus. Pour autant, les déploiements doivent être gérés efficacement dans le respect des contraintes de délais.

C’est la difficulté majeure de pilotage de ces opérations. Aussi, les sites d’une même opération peuvent être espacés de quelques centaines de mètres comme à des milliers de kilomètres, sur l’ensemble du territoire, mettant en évidence une contrainte géographique. Enfin, leurs constructions et installations sont la responsabilité de multiples acteurs, ajoutant ainsi des difficultés de coordination de ces phases critiques. Comment assurer, dans ces conditions, une logistique qualitative de bout en bout de la chaîne ? L’enjeu est de taille.

Florian Gayraud, Projects Director et spécialiste de la Supply Chain chez ITD, dresse pour nous un état des lieux.

Des enjeux supply chain dès la phase achat

Dès la phase initiale d’achat et de négociation fournisseurs, les caractéristiques d’une supply chain challengeante sont réunies :

  • nombre de fournisseurs mondiaux très limité,
  • exigences du réseau existant qui contraint la sélection du fournisseur pour une compatibilité des équipements,
  • exigences d’un marché mondial dont le besoin est consécutif à l’essor de nouvelles technologies, induisant une compétition des pays pour fournir les nouveaux services en priorité.

Ainsi, les principaux fournisseurs d’équipements télécom (Huawei, Nokia, Ericsson) contrôlent le marché et la technologie. Les opérateurs sont tributaires d’un catalogue produits mis à leur disposition. Ils doivent à partir de ce dernier clairement définir leurs besoins techniques. En cohérence avec le plan radio ou transmission à mettre en œuvre, ils peuvent lister les équipements nécessaires pour chaque programme. C’est la phase de pré-commande. Toutefois, les spécificités techniques de chaque installation – non connues à ce stade des commandes – peuvent impacter ce listing (Bill of quantity).

Approvisionnement séquencé

Les contraintes d’approvisionnement et le planning de mise en service des installations doivent être mis en corrélation. Ceci afin de prioriser et séquencer les flux en provenance des fournisseurs. De manière évidente, la multiplicité des stratégies de stockage impacte fortement les conditions de fourniture des équipements. Ces derniers doivent être livrés – par transport routier, aérien ou maritime – dans le pays, dans le respect de la réglementation douanière. La gestion documentaire est alors primordiale pour limiter l’impact temporel du passage de la frontière. Certaines réglementations peuvent exiger des mécanismes d’imports spécifiques multipliant les intermédiaires ou obligeant de limiter les livraisons.

Stockage et distribution

Les équipements livrés dans le pays de destination doivent maintenant être stockés puis distribués en fonction des programmes et projets. Les enjeux de distribution sont multiples. Comment répartir les entrepôts sur le territoire?

  • Par type d’équipement (fournisseur, commande initiale, spare parts),
  • par fonctionnalité métier (radio, transmission, génie civil),
  • par optimisation d’approvisionnement fournisseur ou de livraison des sites,
  • par contrainte de distribution (capacité de levage, rapidité de distribution),
  • par sous-traitant,
  • par type de gestion (gestion de stockage, réapprovisionnement, one shot),
  • ou de manière mixte, multi-critères.

Le schéma de stockage sur le territoire, que ce soit par la fonction de chaque entrepôt, ou leur répartition géographique par exemple, a un impact direct sur la structuration et l’organisation des approvisionnements en provenance des fournisseurs.

En quoi le suivi spécifique de chaque site permet une meilleure gestion des flux globaux?

Les flux jusqu’alors massifiés par fournisseur doivent à présent répondre à une logique de site multi-fournisseurs et multi-équipements. Les stocks doivent répondre aux besoins spécifiques de chaque région. Il s’agit d’une phase de stockage et préparation majeure ayant un fort impact sur la création de valeur.

Ces actions logistiques devant être réalisées en parallèle de l’avancement du déploiement des sites, la maîtrise des informations propre à chaque site est primordiale. En effet, les contraintes temporelles sont trop importantes pour pouvoir prétendre à un processus linéaire. La bonne correspondance des informations relatives au design du site avec celles issues du processus d’approvisionnement est la clé. Elle permet d’envisager, avec plus de garantie, l’approvisionnement des bons produits, en bonne quantité, et stockés au bon endroit.
Enfin, les équipements doivent être distribués au bon moment sur chaque site pour permettre leur installation. C’est le dernier défi de la chaîne logistique, toujours complexe.

Supply Chain : levier de performance

En conclusion, les enjeux logistiques des opérations communes de déploiement et/ou d’upgrade sont importants. Bien que le risque financier opérationnel lié à une défaillance de sous-traitance soit contenu : contrat clé en main, montant global forfaitaire d’installation, l’incidence financière de la coordination des flux physiques et d’information demeure. Par le coût des équipements à installer (CAPEX) d’une part et par le coût commercial de retards de mise en air (perte de revenus) d’autre part. Ainsi, l’analyse logistique et la mise en œuvre de standard de pilotage supply chain (processus, base de données) constituent un levier majeur de performance des opérations communes de déploiement et d’upgrade.

Une fois les équipements installés sur site, c’est un nouveau cycle de vie opérationnel qui doit être géré. Correspondance matérielle et financière de la base d’asset, gestion des allocations des équipements et historique, maintenance et gestion des pièces détachées, … relèvent d’autant de défis logistiques.